Le PIN
« Pin » est la désignation générique des conifères appartenant au genre Pinus, de la famille des Pinacées. En Haïti, ils sont appelés « bois chandelle » ou « bois pin ». Ce sont des résineux à feuilles en aiguilles groupées en faisceaux par 2, 3 ou 5 et dont les fructifications sont des cônes constitués d’écailles à l’aisselle desquelles on trouve les graines. Ce genre est de loin le plus important des conifères. Au moins 111 espèces ont été décrites, parmi lesquelles beaucoup sont des essences forestières importantes. Plusieurs espèces, introduites hors de leur habitat naturel sont localement devenues envahissantes.
Les espèces du genre Pinus sont les arbres les plus répandus dans le monde, essentiellement dans l’hémisphère nord bien que souvent naturalisés dans l’hémisphère sud.
D’autres espèces de conifères sont appelées improprement « pins » alors qu’elles ne font pas partie du genre Pinus. C’est le cas du pin d’Oregon, plus souvent appelé « sapin de Douglas » en Europe, qui n’est en fait ni un pin ni un sapin mais un membre du genre Pseudotsuga ; un autre exemple en est le Wollemia nobilis, une espèce d’Araucariaceae, qui est également appelée improprement « pin de Wollemia ».
Stature
En général, les pins sont des arbres de grande taille à croissance mono- podiale, comme la plupart des autres conifères. Seules quelques espèces manquent de dominance apicale, comme Pinus sabiniana en Californie. D’autres peuvent également être trouvés sous forme de buissons quand ils vivent dans des environnements difficiles.
Quatre espèces – toutes originaires de Californie ou du Nord-Ouest des États-Unis – peuvent atteindre 60 m de haut, et l’une d’elles (Pinus lambertiana) peut aller jusqu’à 75 mètres. Quelques espèces cependant n’atteignent que des tailles modestes, en raison des conditions extrêmes où ils vivent; on note en particulier le groupe des Pins à pignons ainsi que les arbres vivant proche de la limite des arbres. Ces derniers peuvent cependant atteindre une hauteur normale si on les plante dans de meilleures conditions.
De manière générale, l’allure générale des pins est hautement variable. Non seulement les espèces sont différentes les unes des autres mais en plus les divergences entre individus d’une même espèce peuvent être importantes. La plasticité morphologique des pins est plus importante que celle d’autres genres de la famille des pinacées.
Longévité
Un grand nombre d’espèces de Pins peuvent vivre très longtemps. Une douzaine d’espèces peuvent atteindre 1000 ans. En particulier, Pinus aristata et Pinus longaeva peuvent vivre jusqu’à 5000 ans, et on soupçonne Pinus balfouriana de pouvoir en faire autant.
Le grand âge que peuvent atteindre ces arbres en ont fait un objet d’étude de choix pour la dendrochronologie; ce furent d’ailleurs les premiers arbres à être utilisés par Andrew Douglas pour comprendre le climat des derniers millénaires.
Branches et feuilles
Les pins, comme beaucoup d’autres conifères, ont des feuilles en forme d’aiguilles plus ou moins piquantes, souvent d’un vert foncé, et qui sont persistantes. Appelées aiguillons, leur durée de vie varie selon les espèces (généralement de 3 à 7, 8, 10 ou 14 ans, voire plusieurs décennies selon l’essence et les conditions écologiques).
Les pins sont caractérisés par un extrême dimorphisme de leurs rameaux, ce qui les distingue des autres genres de la famille des Pinacées. Un premier type de rameau long (appelé auxiblaste), ne porte que des feuilles stériles en forme d’écailles, qu’on appelle les Euphylles (le terme désuet d’euphylle signifie littéralement « vraie feuille »). Ces véritables feuilles brunâtres, comprimées contre les jeunes rameaux qu’elles masquent pratiquement et totalement incapables d’assurer la photosynthèse. Ces branches permettent à l’arbre de s’étendre horizontalement.
Le deuxième type de rameau est de taille très réduite ; ce rameau nain ne croît pas au-delà de quelques centimètres. On trouve à leur extrémité un unique groupe d’aiguilles, qu’on appelle un fascicule d’aiguilles. Ces fausses-feuilles qui réalisent la fonction de la photosynthèse ne sont que les prolongements chlorophylliens sous-tendus par des cataphylles plus minces que ceux des branches stériles, mais celles-ci fusionnent pendant la croissance des aiguilles pour former une gaine. Cette gaine peut être caduque ou bien persistante, selon l’espèce.
Le nombre d’aiguilles par fascicule varie selon l’espèce : les pseudophylles sont groupés par 2 (pin sylvestre, pin maritime), 3, ou 5 (pin blanc d’Amérique). Il varie parfois au sein de l’espèce (notamment pour Pinus ponderosa, Pinus echinata[9] et certains pins mexicains) ; Dans la grande majorité des cas, il fait partie des premiers termes de la suite de Fibonacci, le plus souvent deux, trois ou cinq, rarement une (chez Pinus monophylla) ou 8 (chez Pinus durangensis, qui en a toutefois plus souvent cinq).
Les jeunes pousses de nombreux pins (à l’exception des plus toxiques comme le Pin ponderosa, le Pin tordu ou le Pin de Monterey) sont consommées crues, ajoutées aux salades ou à divers plats (desserts…). Le jeune feuillage vert clair à l’extrémité des rameaux a un goût acidulé d’agrume dû à une huile essentielle renfermant du limonène (comme l’essence de citron) qui pourrait constituer un système de défense des arbres contre les herbivores (effet répulsif ou toxique de ce monoterpène contre les larves et les insectes, action fongistatique sur leur microbiote intestinal, réduction de l’oviposition, attraction de parasitoïdes ou de prédateurs de ces insectes). Le feuillage adulte est constitué d’aiguilles trop coriaces pour être mangées, mais elles sont parfois utilisées pour la préparation de sirops, d’infusions (tisane, thé doué de vertus expectorantes et diaphorétiques) ou aromatiser des vins.
Racines
Le système racinaire des pins est de type pivotant. La longue racine principale et les latérales permettent à l’arbre de s’ancrer dans le sol. Il se développe rapidement après la germination et fait généralement trois fois la taille de l’appareil végétatif qui est à l’air libre ; cependant il ne fait plus qu’un dixième du poids de l’arbre adulte.
Les pins sont, sans aucune exception, des arbres en association obligatoire avec des champignons. Sans eux, ils ne poussent pas. En effet, ils ont une capacité de se nourrir de façon autonome très limitée, les poils absorbants de leurs racines étant quasiment inexistants. Les colons européens des XVIIIe et XIXe siècles le savaient sans le comprendre car la mise en culture de pins dans les colonies africaines pour la construction de bateaux échouait systématiquement si de la terre n’était pas transportée avec les plants depuis l’Europe. C’est le biologiste allemand Albert Frank qui est le découvreur en 1885, à partir de la relation entre la truffe et le chêne, du principe des ectomycorhizes, c’est-à-dire que le mycélium du champignon forme un manchon autour des racines de l’arbre tout en pénétrant dans leurs cellules externes. En 1894, après des comparaisons entre des pins stérilisés et d’autres ré-inoculés de champignons formant des mycorhizes, il comprend l’effet indispensable et bénéfique de cette association, le champignon apportant eau et sels minéraux grâce à son réseau étendu d’hyphes et l’arbre apportant les glucides grâce à la photosynthèse. Cette symbiose efficace permet aux pins de pousser sur des sols pauvres en nutriments où beaucoup d’autres espèces ne survivraient pas. Les ectomycorhizes, qui sont présentes sur de nombreux arbres de l’hémisphère nord, seraient d’ailleurs apparues avec les pins, il y a 140 millions d’années.
Organes sexuels
Les pins sont des gymnospermes, ce qui signifie qu’ils n’ont au sens strict ni fleur, ni fruit, au contraire des angiospermes comme le pommier ou le chêne. La différence fondamentale entre les fleurs véritables de ces derniers et les fausses fleurs des gymnospermes est la présence chez les premières d’une enveloppe (le carpelle) autour des ovules qui se transforme après la fécondation en fruit.
Les structures reproductrices des gymnospermes se trouvent à la surface de feuilles modifiées ressemblant à des écailles (qu’on appelle « sporophylle« ). Chez le pin, celles-ci se rassemblent pour former un strobile, que l’on appelle « cône » une fois arrivé à maturité. Ces cônes sont appelés dans le langage courant « pomme de pin » (ou « pigne », dans les régions occitanes). Les cônes sont soit mâles soit femelles, mais un même individu porte toujours des cônes des deux sexes (les pins sont donc monoïques).
Les strobiles mâles sont situés à la base des nouveaux rameaux. Ils peuvent être situés soit uniquement en dessous d’eux, soit de part et d’autre. En général il y a peu de différence entre les cônes mâles des différentes espèces. Ils sont constitués de petites écailles (les microsporophylles) assemblés en cônes qui ressemblent à des chatons (ce qui signifie qu’ils sont plutôt longiformes et souples). Chaque microsporophylle porte sur sa face inférieure les organes sexuels mâles qui sont constitués de deux sacs de pollen appelés microsporanges. Chaque grain de pollen a deux sacs d’air qui lui permettent de bien flotter dans l’air et de se disperser sur des grandes distances. Ces grains de pollen se ressemblent beaucoup entre eux quelle que soit l’espèce et même ressemblent beaucoup à ceux d’autres groupes de la famille des Pinaceae, ce qui rend compliquée l’utilisation de la palynologie pour comprendre la répartition antérieure des pins.
Les strobiles femelles sont situés à l’extrémité de nouveaux rameaux, de part et d’autre de son bourgeon terminal. Dans certains cas ils forment une verticille autour de celui-ci. On les trouve la plupart du temps sur les branches les plus hautes. Ils pointent tout d’abord vers le haut puis se courbent ou bien deviennent tombants.
Contrairement aux microsporophylles, les écailles du cône femelle (macrosporophylles) sont sous-tendues par des bractées. Celles-ci sont au départ, plus grandes que les macrosporophylles, mais la relation s’inverse au cours de la maturation, et elles ne sont presque plus visibles sur le cône mûr. La forme et la taille du cône femelle varient énormément entre les espèces. De manière générale, les espèces qui vivent dans des conditions difficiles ont des cônes plus petits; à peu près le tiers des espèces de Pins ont des cônes de moins de 5 cm de long. Certains sont cependant imposants : le record de taille est de 50 cm de longueur pour Pinus lambertiana et celui de poids est de 2,3 kg pour Pinus coulteri.
Reproduction
Les écailles des cônes fécondés s’écartent à maturité, libérant les graines. Celles-ci sont munies d’une aile plus ou moins allongée. Les embryons possèdent de 4 à 24 cotylédons (noms donnés aux feuilles embryonnaires). Les premières feuilles apparaissent en dessous et sont suivies par des aiguilles secondaires.
Certaines espèces, dont le pin gris ou le pin tordu latifolié, produisent des cônes qui ne libèrent leurs graines qu’après avoir été soumis à une chaleur intense, comme celle d’un feu de forêt.
Lumière
Tout comme la majorité des plantes, les pins sont des organismes photoautotrophe, ce qui signifie qu’ils sont capables d’utiliser la lumière du soleil et le dioxyde de carbone pour synthétiser leurs molécules organiques par un processus appelé la photosynthèse.
Les différentes espèces de plantes ne sont pas égales dans leur capacité à la réaliser. De manière générale, les arbres à feuilles persistantes assimilent moins de carbone par unité de temps et de surface foliaire (ou de masse), et les pins ne font pas exception à la règle. Au sein du genre Pinus, les vitesses maximales varient entre espèce et entre individus d’une même espèce, cette dernière composante semblant plus importante.
Si une plante reçoit trop peu de lumière, elle n’est plus capable de faire fonctionner son métabolisme correctement et est susceptible de s’affaiblir et de mourir. Par comparaison avec d’autres conifères, les Pins gèrent assez mal ce manque de lumière. Il leur faut par exemple deux fois plus de lumière que les Sapins pour que les molécules organiques synthétisées par la photosynthèse compensent celles consommées par la respiration. Il leur faut également plus de lumière pour arriver à leur vitesse maximale de photosynthèse. Cela explique le fait que les Pins sont globalement des essences intolérantes à l’ombre.
Habitat
Les pins sont des essences sociales de pleine lumière, qui supportent bien la sécheresse, et les sols pauvres et pour plusieurs espèces les embruns salés. Ils peuvent former des peuplements importants, comme les écosystèmes pinifères, mais craignent la concurrence des autres essences quand ils sont plantés hors de leur optimum écologique stationnel.
Pathologies
Des pins sont victimes de la pollution de l’air et de plusieurs maladies émergentes, dont l’une est causée par un nématode dont l’aire s’étend depuis plusieurs décennies : le nématode du pin (Bursaphelenchus xylophilus).
Prédateurs
Les papillons de nuit (hétérocères) suivants (classés par famille) se nourrissent de pin :
- métrocampe verte (Geometridae),
- bombyx du pin,
- lunigère (Lasiocampidae),
- la nonne (Lymantriidae),
- méticuleuse,
- processionnaire du pin (Noctuidae),
- isabelle (Saturniidae),
- sphinx du pin (Sphingidae).